Faire différent
Lorsque vous pêchez une fosse en même temps que d'autres pêcheurs, prenez le temps d'observer les équipements, les mouches et les techniques de pêche qu'ils utilisent. Utilisez vos équipements, vos mouches et vos techniques de façon différente des autres pour que le saumon soit surpris par la différence.
Le lancé
Nous ne parlerons pas ici des différentes techniques de lancer à la mouche, nous tenons pour acquis que ceux qui lisent ces quelques lignes ont appris à lancer à la mouche ou s'intéresseront assez à la pêche au saumon pour apprendre. En plus, il est très difficile d'apprendre à lancer une mouche en lisant des techniques. Rien de mieux que la pratique.
Toutefois, on expliquera le mieux possible deux techniques qui ne sont pas bien connues ou du moins pas beaucoup utilisées. La double traction vous donnera entre 10 et 15 % de plus de distance sans effort supplémentaire alors que le lancer roulé vous permettra de "passer une mouche" dans des endroits que vous auriez habituellement ignorés.
La double traction
Cette technique consiste à accélérer le déplacement de la ligne lorsqu'elle est dans l'air afin d'augmenter la distance du lancer. La main gauche fait tout le travail, qui se décompose en deux temps, tout d'abord lors du lancer arrière, puis sur le lancer avant.
On exécute une traction au moment où la canne est la plus fléchie vers l'avant et une autre lorsqu'elle est la plus fléchie vers l'arrière. Pour faire cette traction, on baisse la main qui tient la ligne d'un geste énergique jusqu'à la taille, avant de la ramener au niveau de la canne, presque comme avec un élastique, tandis que la ligne se déroule dans les anneaux.
La plupart des pêcheurs réussissent la première de ces tractions mais éprouvent des difficultés pour réaliser la seconde.
On peut pratiquer ce mouvement en travaillant la synchronisation sans canne.
Ainsi, on bascule lentement vers l'arrière la main qui tient normalement la canne tout en effectuant de l'autre le mouvement de traction approprié. Mimer ces gestes permet de s'assurer que la main tenant la ligne remonte aussitôt jusqu'à la canne. On entre alors dans la phase du lancer avant, pendant laquelle s'effectue à nouveau le mouvement de "va-et-vient" de la main tenant la ligne. On mime les différentes phases au ralenti, jusqu'à ce que s'établisse un automatisme musculaire. Dix minutes suffisent dans un premier temps, avant d'atteindre progressivement la vitesse de lancer adéquate. Une fois que ce mouvement a été mémorisé, il est possible de mettre rapidement en pratique la technique de la double traction avec la canne.
1. Effectuez préalablement un faux lancer vers l'arrière puis vers l'avant afin que la ligne se trouve devant vous.
2. Les deux mains amorcent le mouvement arrière ensemble, jusqu'à ce que la canne soit sous la charge maximale.
3., 4., 5., 6., 7. Tirez la ligne vers le bas, puis laissez aussitôt la main gauche remonter pour rejoindre l'autre main lorsque le lancer arrière s'achève.
8. Lorsque la boucle se résorbe, les deux mains sont proches l'une de l'autre,
9. On procède alors au lancer avant en maintenant les mains dans cette position,
10., 11. La main gauche tire la ligne vers le bas.
12. Le mouvement descendant continue.
13. La main gauche lâche la ligne.
14. La canne poursuit le mouvement pour achever le lancer.
Lancé roulé
On utilise cette technique pour lancer une mouche lorsque l'on ne dispose pas de l'espace suffisant pour effectuer le lancer arrière habituel. Il doit être exécuté en donnant un coup de poignet à hauteur des yeux pour sortir la ligne de l'eau pendant qu'elle se déroule vers l'avant. Ce lancer requiert beaucoup plus de force et le coup de poignet est essentiel. On amène lentement la canne à 1h00 et on laisse la ligne former un petit ventre. On casse ensuite le poignet avec force, jusqu'à 10h00.
1. Commencez avec la pointe de la canne dirigée vers l'eau.
2., 3., 4. Soulevez lentement la canne pour faire glisser la ligne au-dessus de la surface de l'eau. Faites pivoter légèrement le poignet pour incliner davantage la canne vers l'arrière. La ligne forme une grande boucle. Marquez alors une pause. Cette grande boucle va donner sa puissance à la canne pour le lancer; on doit donc la laisser se former pleinement.
5., 6., 7. Le lancer avant est beaucoup plus sec et plus court que le lancer droit, comme si l'on donnait un coup de poing; on achève le lancer en laissant la canne accompagner le mouvement.
Vitesse
Il faut faire dériver sa mouche à la bonne vitesse dans l'eau. La vitesse de déplacement de la mouche dans ou sur l'eau est difficile à décrire car cette vitesse est difficilement mesurable pour le pêcheur. Il s'agit d'un sens qui se développe avec la pratique.
La mouche doit avoir un certain mouvement par rapport au saumon dans la fosse. L'absence de mouvement ou la lenteur de déplacement d'un objet ne fera pas réagir le saumon. La mouche doit dériver naturellement; ce qui signifie qu'elle doit se déplacer à peu près à la vitesse du courant.
Mais, il y a des exceptions à cette règle. Si vous lancez votre mouche lorsque le saumon est placé dans un courant très lent, elle ne dérivera pas à une vitesse assez élevée pour intéresser le saumon. Au contraire, votre mouche peut être entraînée à vive allure parce que le saumon se trouve dans un courant rapide. Le saumon se déplace généralement lentement pour prendre une mouche sèche ou noyée, ce que vous devez prendre en considération lorsque vous présentez votre mouche. Dans ces situations, vous devrez utiliser des techniques pour rendre votre mouche alléchante pour le saumon.
Mouche
Pourquoi l'attaque ?
Selon certains, le saumon attaquerait la mouche artificielle par jeu, par colère, par réflexe, par réminiscence, par habitude. Il serait choqué d'apercevoir un objet et voudrait l'écarter de sa frayère. Il attaquerait la mouche à cause du goût des insectes encore présent dans sa mémoire. Cela pourrait aussi venir du réflexe de gober tout ce qui passe à portée de sa gueule, puisqu'il a consacré tout son temps à s'engraisser en mer.
Probablement que le saumon attaque des mouches lorsqu'un ensemble de conditions déterminées est présent. Selon la psychologie de l'homme, qui pourrait s'appliquer à tout être vivant, tout geste, toute action est en réaction à des stimuli internes et externes; le comportement est la résultante de stimuli dont l'interaction est plus ou moins complexe.
Les facteurs internes s'expliquent par l'état physiologique du saumon. Les facteurs externes comprennent la luminosité ambiante, la température de l'eau, le débit et la vitesse de l'eau, la quantité d'oxygène dans l'eau, la turbidité de l'eau et sa profondeur, le relief du lit de la rivière, ainsi que le type, la grosseur, la construction, la couleur et le mouvement de la mouche dans les fosses, etc.
On ne peut agir sur les facteurs internes du saumon; toutefois, on peut présumer qu'en certaines occasions il est plus réceptif à notre mouche (ex. lorsqu'il vient de monter des rapides et qu'il arrive dans la fosse). Nous devons donc nous concentrer sur les facteurs externes afin de l'inciter à prendre la mouche.
Modèle
Pour beaucoup de pêcheurs, le choix d'un modèle précis a une importance capitale; ce qui n'est pas nécessairement vrai. Les choix à poser pourraient être décrits dans l'ordre suivant : le type de mouche à utiliser, noyée ou sèche, la grosseur, sa construction, sa couleur, et finalement le modèle. Même s'il existe des milliers de modèles de mouche à saumon, un pêcheur peut facilement se contenter d'une douzaine de modèles. Vous pouvez avoir un aperçu de mes modèles préférés, en cliquant ici.
Le choix du modèle de la mouche doit se faire rationnellement et systématiquement. On commence par choisir entre une mouche sèche et une mouche noyée.
Noyée
La mouche noyée doit caler instantanément de quelques centimètres en touchant l'eau. Son poids dépend de l'hameçon mais aussi des matériaux enroulés autour de la hampe de l'hameçon. Plus l'hameçon est gros, plus la mouche devrait être pesante. Un hameçon double est plus pesant qu'un hameçon simple. Mais certains hameçons de même grosseur et de même longueur mais fabriqués par des compagnies différentes peuvent avoir des poids très différents.
Le choix de la grosseur de la mouche dépend des conditions de l'eau. En début de saison, lorsque l'eau est haute et froide, on emploie généralement des grosses mouches. À mesure que la saison progresse et que l'eau baisse, nos mouches noyées diminuent de grosseur. Lorsque l'eau devient très basse, on peut même diminuer la grosseur des mouches noyées à des hameçons 10, 12 et certains iront même avec de plus petits hameçons.
Le choix de la mouche doit aussi se faire par rapport à la vitesse du courant. Dans des eaux rapides, la mouche devrait généralement être plus grosse; plus l'eau devient lente, plus on diminue la grosseur de la mouche.
Lorsqu'on emploie de très petites mouches (inférieures à 10), on devrait prendre l'habitude d'augmenter la longueur de l'avançon. Toutefois, ces petites mouches obligent à être d'une délicatesse extrême lorsqu'un saumon y est accroché car si l'on force le saumon avec une petite mouche, on risque de la voir lui sortir de la gueule.
Une règle de pêche dit : temps clair, mouches claires, temps foncé, mouches foncées. Elle est vraie, la plupart du temps. Mais comme le saumon distingue les couleurs, durant le jour, en fonction de la turbidité de l'eau, il doit bien voir la mouche. Tout dépendant de la luminosité, par temps ensoleillé, on peut utiliser des mouches comme Silver Rat, Cossaboom, Mickey Finn, Magog Smelt alors que par temps couvert ou pluvieux, certaines mouches comme Black Dose, Black Bear Green Butt, Black Rat ont du succès. Toutefois, n'oubliez pas de faire différent. Si les autres pêcheurs utilisent des mouches claires par temps clair et ne prennent pas de saumon, essayez une mouche foncée !
Lorsqu'on aborde une fosse qu'on ne connaît pas, il est avantageux de commencer par passer une mouche noyée car elle permet de couvrir le plus de surface possible et d'observer, en descendant la fosse, les endroits où le saumon pourrait se tenir.
Lorsque l'eau sera haute et froide, lorsqu'elle sera brouillée ou lorsqu'elle sera bouillonnante, une mouche noyée fera bien l'affaire, même dans la pénombre (à l'aurore ou au crépuscule).
Lorsque l'eau est haute et froide, c'est-à-dire surtout en début de saison de pêche, le saumon se retrouve partout en rivière. Il n'est pas nécessairement arrêté dans les fosses; s'il est dans une fosse, il peut être partout dans la fosse. À cette période, le saumon a plus épais d'eau au-dessus de la tête et cette eau est parfois moins claire: il verra donc plus facilement une mouche noyée qu'une mouche sèche.
Sèche
La grosseur de l'hameçon employé dans le montage des mouches sèches détermine sa forme et sa grosseur. Ces hameçons sont faits d'un métal de diamètre plus petit que les mouches noyées, pour qu'elles soient plus légères, donc pour qu'elles flottent mieux.
Même si le saumon est conscient des différentes couleurs, c'est par rapport au mouvement qu'il réagit le plus. C'est la vitesse de déplacement de la mouche dans son champ visuel qui l'incite à attaquer.
L'utilisation de la mouche sèche prédomine lorsque le niveau de l'eau baisse et que la température de l'eau augmente, ce qui permet aux saumons de mieux voir la mouche sèche qui flotte sur l'eau. On obtient plus de succès à la sèche lorsqu'on a déjà repéré l'endroit où est le saumon. On y pêche surtout dans les cirés ou on explore des portions de fosse où l'on croit que le saumon peut s'arrêter. Et souvent, on ne pêche à la sèche que pour se faire plaisir. Quel moment solennel lorsqu'on voit un saumon partir de sa position, monter doucement et prendre notre sèche ! Ces quelques secondes valent bien des jours de pêche sans succès !
Techniques à la noyée
En pêchant à la noyée, vous vous déplacerez de l'amont vers l'aval, c'est-à-dire dans le même sens que le courant. La plupart du temps, vous utiliserez une soie flottante. Cependant, la soie à bout calant, ou calante sur toute sa longueur peut être employée plus efficacement lorsque l'eau est haute et/ou sale ou même en période d'étiage.
En abordant une fosse pour la première fois, il y a avantage à la couvrir systématiquement afin de faire passer votre mouche au-dessus de tous les repaires susceptibles de retenir du saumon. Évitez de pénétrer trop loin dans l'eau, afin de ne pas alerter ou effrayer le saumon qui s'y trouverait.
Pensez à régler la tension du frein de votre moulinet pour qu'elle soit juste suffisante pour éviter que le moulinet ne se dévide facilement. Déroulez environ 3 mètres de soie et faites un premier lancer; tenez la canne parallèle à l'eau pendant que la mouche voyage dans l'eau. Une fois la dérive terminée, retirez la soie de l'eau et lancez de nouveau, en allongeant la soie de 25 à 30 cm, et recommencez le manège décrit précédemment. Répétez ces gestes jusqu'à ce que vous ayez couvert la largeur du rapide ou lorsque vous aurez atteint votre capacité maximum de lancer. Pendant que vous posez ces gestes, ne changez pas de position. Lorsque votre lancer est à sa distance maximum, commencez à descendre le long de la fosse. Vous avancez de un ou deux pas à chaque un ou deux lancers, jusqu'à ce que la mouche atteigne la queue de la fosse. N'avancez jamais pendant que la mouche dérive encore, pour ne pas modifier sa course et ainsi l'empêcher de passer au-dessus d'un repaire de saumon. Lorsque vous pêchez comme décrit ci-dessus, vous êtes toujours en avant du saumon. N'oubliez pas, la pêche à la mouche noyée s'effectue de l'amont vers l'aval, donc de la tête à la queue (du haut vers le bas), mais pas n'importe comment, sinon vous risquez de perdre beaucoup de temps à penser que votre technique est bonne et que c'est le saumon qui n'est pas mordeux, pendant que les pêcheurs expérimentés autour de vous auront du succès.
Un lancé, deux ou trois pieds
À la noyée, certains pêcheurs ne jurent que par la technique des "trois lancers, quinze centimètres" pour être certains que le saumon aura vu la mouche. Toutefois, comme on l'a dit auparavant, c'est l'effet de surprise qui semble être le stimulus le plus efficace pour faire mordre le saumon. Cette technique n'engendre que très peu de surprise. Là où son efficacité est à son comble, c'est dans l'écœurement des pêcheurs qui attendent derrière celui qui l'utilise ! Si l'eau devient sale, il peut aussi être avantageux de prospecter la fosse de quinze centimètres en quinze centimètres pour susciter l'attaque.
Cette technique peut permettre de prendre du saumon mais celle qui donne les meilleurs résultats est plutôt "un lancer, deux ou trois pas" vers l'aval de la rivière. En eau claire, un lancer tous les un mètre est suffisant pour couvrir toute la fosse et l'effet de surprise existe encore. Vous passerez la fosse plus vite et vous pourrez passer deux mouches différentes dans la fosse; deux mouches présentées de mètre en mètre valent mieux qu'une présentation de quinze centimètres en quinze centimètres.
Profondeur de la mouche
La mouche devrait dériver généralement de cinq à quinze centimètres sous l'eau. N'oubliez pas que plus elle est grosse et lourde, plus elle calera; mais, plus le courant est rapide, moins elle calera. Ainsi, plus la vitesse de l'eau est rapide, plus la mouche doit être grosse pour caler. Quand on parle de grosses mouches, on entend les 2 et 4; les moyennes sont les 6 et 8 et les petites sont les 10, 12 ou plus.
Lancer long ou court
La longueur du lancer a une incidence sur la vitesse de défilement de la mouche devant le saumon. Dans un rapide, si vous devez rejoindre les saumons situés sur l'autre rive, et que vous effectuez un lancer court, la soie sera emportée par le rapide parfois même avant que votre mouche commence à descendre. Il vous faut alors allonger les lancers en diminuant l'angle du lancer par rapport au courant; la soie sera ainsi moins emportée par le courant et sa vitesse sera diminuée.
Comme on le verra plus loin, il est recommandé de lancer à 45° par rapport au courant, ce qui est un angle considéré normal. Si le courant est fort, en diminuant cet angle, les lancers doivent s'allonger pour couvrir toute la largeur de la fosse.
Lorsque le courant est lent il faut augmenter l'angle d'attaque de 45° peut-être même jusqu'à 70 ° pour maintenir la vitesse de la mouche. Si la fosse ne va pas en s 'élargissant, il faut alors raccourcir la longueur de la soie présentée.
Donc la longueur des lancers dépend de la localisation des saumons, mais aussi de la vitesse que doit avoir la mouche.